La culture de Cannabis sativa et la commercialisation de ses produits dérivés sont encadrées par des réglementations strictes. Valbiom propose un éclairage sur l'évolution récente de la législation belge en la matière, en mettant en lumière les impacts pratiques de ces modifications pour les acteurs du secteur.
L’arrêté royal du 24 avril 2024
L’arrêté royal du 24 avril 2024 a été publié au Moniteur belge le 22 mai dernier. Cet arrêté porte sur diverses dispositions en matière de stupéfiants, de substances psychotropes et de substances vénéneuses et toxiques. Les sommités fleuries et fructifères de la plante de cannabis tombent sous cette législation. Il est entré en vigueur le 1er juin 2024.
L’article 3 de l’AR du 24 avril 2024 entérine la modification de l’article 6, §2 de l’AR de 2017. Ceci est la base légale pour la culture de cannabis / chanvre à 0.3% de THC total. Pour rappel, le chanvre reste une culture interdite, sauf la culture selon les conditions du Règlement européen en référence (voir ci-dessous*).
L’article 19 de l’AR du 24 avril 2024 mentionne :
Art. 19. Dans l'annexe IVB du même arrêté**, les modifications suivantes sont apportées :
a) Dans la ligne commençant par « PLANTE DE CANNABIS », le mot « toute » est remplacé par les mots « toutes les parties de la » ;
b) Dans la ligne commençant par « PLANTE DE CANNABIS », le mot « 0,2 » est remplacé par le mot « 0,3 » ;
(**) Renvoyant à l’Arrêté royal du 6 septembre 2017.
Qu’est-ce que cela signifie ?
Cela implique concrètement qu’en Belgique, les sommités fleuries et fructifères de la plante de cannabis peuvent être commercialisées si elles ne dépassent pas 0,3 % de la somme en THC et THCA. Précédemment, la limite était de 0,2 %. Attention, d’autres réglementations entourent la vente de ces produits.
Au niveau européen, le règlement (UE) 2021/2115* du 2 décembre 2021 précise dans l’article 4, paragraphe 4 : les surfaces utilisées pour la production de chanvre ne sont des hectares admissibles que si les variétés utilisées ont une teneur en tétrahydrocannabinol n’excédant pas 0,3 %.
Il s’agit de la définition des surfaces de l’exploitation donnant droit à des paiements (PAC). Cela est valable pour la Belgique.
(*) RÈGLEMENT (UE) 2021/2115 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 2 décembre 2021 établissant des règles régissant l’aide aux plans stratégiques devant être établis par les États membres dans le cadre de la politique agricole commune (plans stratégiques relevant de la PAC) et financés par le Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), et abrogeant les règlements (UE) no 1305/2013 et (UE) no 1307/2013 (JO L 435 du 6.12.2021, p. 1).
Article 4.4.c.iv
Les surfaces utilisées pour la production de chanvre ne sont des hectares admissibles que si les variétés utilisées ont une teneur en tétrahydrocannabinol n’excédant pas 0,3 %.
La commercialisation des feuilles de chanvre en tisane
Le 2 juin 2023, la Commission européenne a confirmé le retrait des feuilles de chanvre du catalogue des nouveaux aliments, pour être désormais autorisées à la commercialisation en tant qu'aliment traditionnel pour infusion. Ce catalogue Novel Food est composé d’aliments ou d’ingrédients alimentaires non consommés dans l’Union européenne avant le 15 mai 1997 (date d’entrée en vigueur de la première législation relative aux nouveaux aliments).
Cette autorisation ne vaut malheureusement pas en Belgique.
Sur le site de l’AFSCA, un document reprend les principales questions/réponses concernant ce qui est autorisé ou non en matière de denrées alimentaires. Le document répond à la question de l’utilisation de feuilles de chanvre comme suit : « Par ailleurs, une utilisation habituelle des feuilles de chanvre en infusion est également établie. Néanmoins, bien que ces infusions ne soient donc plus considérées comme un nouvel aliment, leur commercialisation reste interdite en Belgique (voir question 7). »¹
En Belgique, aucune dérogation n'a été accordée pour les infusions de feuilles à ce jour, car elles sont classées comme nouvel aliment et présentent un risque potentiel d'utilisation abusive. Nonobstant les dispositions de la législation sur les nouveaux aliments, la législation nationale, à savoir l'arrêté royal sur les plantes (31.08.2021), reste en vigueur. Le catalogue européen précise également que des législations nationales peuvent imposer des restrictions supplémentaires. Par conséquent, les feuilles ne sont pas automatiquement autorisées.
Selon cet Arrêté Royal belge, Cannabis sativa est inclus dans la liste 1 (Plantes dangereuses qui ne peuvent être utilisées en tant que denrées alimentaires), l'utilisation de cette plante en tant que denrée alimentaire est donc interdite (article 3 de cet AR).
Toutefois, l'article 3 de l'arrêté royal sur les plantes (31.08.2021) mentionne également la possibilité de demander une dérogation à cette interdiction. La demande doit prouver, au moyen d'un dossier toxicologique et analytique, que les préparations végétales ne contiennent plus les propriétés ou substances toxiques de la plante d'origine. Cette demande est ensuite soumise au Comité consultatif des préparations végétales, qui émet un avis sur la demande de dérogation.
Le document « Contraintes techniques et économiques à la valorisation des sommités du chanvre textile » reprend notamment ce dernier aspect.
Enfin, retrouvez les questions fréquemment posées et leurs réponses sur la commercialisation du chanvre comme denrée alimentaire : FAQ Chanvre/Cannabis - Santé publique
¹ AFSCA, « Questions et réponses concernant l’utilisation de chanvre (Cannabis sativa L.) et de cannabinoïdes (comme le cannabidiol) en tant que ou dans les denrées alimentaires », 2023.