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Valoriser la laine de mouton : des initiatives émergent en Wallonie

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05.08.2024
Pauline Gillet, Cheffe de projets Produits biosourcés
Valorisation de la laine belge

En Wallonie, plus de 100.000 moutons sont tondus chaque année. En 2021, cela représentait entre 200 et 400 tonnes de laine. Cette année, Valbiom faisait le lien entre producteurs et acheteurs de laine belge, en organisant 5 journées de collecte et vente. L’occasion de revenir sur le potentiel de ces toisons en Wallonie.

La laine de mouton, de nombreuses propriétés à valoriser

La laine de mouton, souvent associée à sa seule utilisation textile, offre en réalité une multitude de propriétés intéressantes.
Elle est non seulement naturelle, recyclable et éco-responsable, mais également durable, isolante, et régulatrice d'humidité. Elle présente des qualités dépolluantes en absorbant des composés comme le formaldéhyde et le dioxyde d’azote. De plus, elle est non allergisante, résistante aux UV et au feu.

Des qualités qui en font un matériau adapté non seulement pour l'industrie textile mais aussi pour l'isolation thermique et acoustique, la literie, et même le jardinage. Elle est infroissable, non-électrostatique, et imperméable, ce qui en fait un matériau polyvalent adapté à divers usages.

Cinq collectes de laine en Wallonie : renouer le lien entre producteurs et acheteurs

Si les collectes de laine n’avaient plus été organisées depuis la crise du covid-19, cela n’était pas sans conséquence pour les éleveurs. Outre le manque à gagner, la laine à entreposer commençait à relever d’un véritable défi logistique pour son stockage. Avec la remise en marche des collectes, Valbiom souhaite ainsi faire le lien entre les producteurs et les usines locales, en favorisant une revalorisation en circuit court.

Cinq journées de collecte ont été organisées à travers la Wallonie. Au total, 42 tonnes de laine ont pu être collectées, pesées, triées et vendues. Les prix pratiqués varient selon la qualité et l'utilisation de la laine : 30 centimes par kilo pour le feutre d’isolation et de maraichage, 80 centimes pour la literie, et jusqu'à 1 euro pour les couettes.

La laine collectée a ensuite été acheminée vers Traitex à Verviers, le plus grand lavoir industriel européen, où elle est nettoyée avant d'être redistribuée aux usines selon sa qualité.

Woolconcept, un modèle de valorisation locale

Woolconcept, projet initié en 2012 par l'entreprise de toiture Zanzen à Waimes, illustre parfaitement le potentiel de valorisation de la laine locale. L'entreprise développe des produits isolants thermiques et acoustiques à partir de laine de mouton. Woolconcept développe également du feutre de paillage à destination des plantations et du maraichage.

A la fois écologiques, performants et recyclables, les isolants en laine de moutons offrent une alternative écologique et naturelle aux isolants conventionnels. La laine est par ailleurs le seul isolant d’origine naturelle à protéger à la fois contre la chaleur, le froid et l’humidité tout en filtrant l’air.

Woolconcept travaille en circuit court et, depuis 2016, la laine transformée et la chaine de transformation (lavage, traitement et feutrage) sont exclusivement belges.

Dans cette démarche, Woolconcept était le partenaire principal de ces cinq collectes. En rassemblant les professionnels de la construction et les acteurs du secteur lainier, Woolconcept entend miser sur la collaboration pour redynamiser le secteur de la laine, et offrir des voies de valorisation essentielles pour les éleveurs wallons.

Lainovation, le lavage de la laine par fermentation

Lainovation est un projet lancé dans le cadre des mémoires INEO à l’UCLouvain. Ce travaille de fin d’étude est mené par Felix Charlier (Bioingénieur), Julien Lebecq (ingénieur civil), Tanguy Goffart (Ingénieur de Gestion) et Gabriela François (Psychologie). La démarche part d’un constat : le lavage de la laine, indispensable à sa valorisation, est un processus très gourmand en eau, rejette des eaux chargées en matière organiques et n’est possible en Belgique qu’à partir de gros volumes de laine. 

En s’inspirant d’une technique ancestrale, Lainovation propose de laver de petits lots de laine par fermentation. Cette technique est économe en eau, et ne nécessite pas de produits chimiques nocifs. Une petite révolution pour le secteur de la laine, et en particulier pour les petits éleveurs et les artisants.

En effet, il existe encore une entreprise emblématique du secteur lainier, spécialisée dans le lavage de la laine en Belgique : Traitex située à Verviers. Mais la chaine de lavage n’accepte que les gros volumes de laine. En dessous d’une tonne, ce qui est considérable pour un petit éleveur, la laine n’est pas acceptée. Lainovation envisage ainsi de développer une solution avec des petites cuves, adaptée aux plus petits volumes.

Un projet à suivre donc, et qui a d’ailleurs été récemment récompensé par la première place du concours Agreen Start-up, lors de la Foire de Libramont 2024.

Valoriser la laine : les prérequis essentiels

La qualité de la laine est essentielle pour sa valorisation. Une bonne laine provient avant tout d'un mouton en bonne santé et d'une tonte bien réalisée. Les autres critères de qualité incluent la pureté de la toison, l'absence de contaminants (paille, chardons), la régularité de la longueur des fibres, et la douceur. Pour des usages spécifiques, des critères comme la couleur, la longueur des mèches, la finesse des fibres, et le gonflant sont également importants.

Qualité de la tonte, de la race, de l’élevage, du tri… Valbiom entend sensibiliser les acteurs aux facteurs impactant cette qualité finale de la laine, et propose un guide pratico-pratique à ce sujet : Les bons réflexes pour une toison de qualité, un indispensable pour valoriser la laine de vos moutons !

La laine wallonne, une filière en développement

L'initiative de Valbiom, qui prévoit de renouveler ces collectes annuelles, est soutenue par une augmentation de 30 % du nombre d'ovins en Wallonie, atteignant près de 97 000 moutons en 2022. Derrière ces chiffres, à raison de 2 à 4 kg de laine par mouton selon l’espèce, ce sont 200 à 400 tonnes de laine qui doivent trouver preneurs. Revaloriser cette ressource est donc crucial, d’autant qu’elle possède de nombreux atouts, pour des utilisations diverses. Reconstruire une filière laine en Wallonie permettrait ainsi de revitaliser l’économie locale, tout en bénéficiant de nouveaux produits et matériaux biosourcés bien de chez nous.

Vous voulez tout savoir sur les acteurs de la laine en Belgique ? Vous voulez connaitre les possibilités offertes par la laine allant de la couette au pull en passant par la tonte, le tri, le fil, le feutre, l’isolant ou le tricot  ? Rendez-vous le dimanche 29 septembre au PAM Expo de Court-Saint-Etienne pour le Made in Wool, le premier grand salon belge dédié à la laine !