Le développement de la filière biométhanisation en Wallonie nécessite l’exploration de solutions durables pour l’approvisionnement des digesteurs, afin de limiter la concurrence sur l’utilisation de la biomasse agricole. Dans ce contexte, les CIVEs ou « Cultures Intercalaires à Vocation Energétique » se présentent comme l’une des meilleures alternatives pour assurer une part de cet approvisionnement. Valbiom s’est ainsi associée à Greenotec pour mener des essais agronomiques sur ce type de couvert particulier, ouvrant de nouveaux horizons pour les séquences culturales dans le paysage agricole.
Les CIVEs, Kesako ?
Les Cultures Intercalaires à Vocation Énergétique (CIVEs) sont des cultures temporaires, semées entre deux cultures principales dans une rotation agricole. Leur rôle est principalement de fournir de la biomasse destinée à la production de biogaz, un vecteur énergétique renouvelable, via la biométhanisation. Dans le cas des CIVEs d’hiver, en plus de produire de l’énergie, ces cultures protègent les sols, évitant leur érosion et le lessivage des nitrates tout en améliorant leur structure.
Quelles espèces sont cultivées pour ces couverts végétaux ?
Dans le cadre de ces essais, Greenotec et Valbiom se concentrent en particulier sur les CIVEs d’hiver. Parmi les espèces couramment choisies pour ce type de CIVE, on trouve des céréales comme l’avoine, le seigle ou le triticale, parfois associées à des légumineuses comme la féverole ou la vesce.
Ces mélanges contribuent notamment à enrichir le sol en azote tout en maximisant la production de biomasse. De ce fait, ces cultures présentent un double intérêt et permettent de conjuguer des bénéfices écologiques et économiques : elles améliorent la durabilité des pratiques agricoles tout en répondant à des objectifs énergétiques.
Quels sont les partenaires pour les expérimentations de 2024-2025 ?
Cette année, la collaboration avec les acteurs de terrain est à l’honneur. Greenotec et Valbiom se sont associés au Biométhane du Bois d’Arnelle et au Biogaz du Haut Geer pour implémenter des essais en conditions réelles. Ces expérimentations sont soutenues par Jorion Philip-Seeds, une entreprise belge spécialisée dans la production, le traitement et la commercialisation de semences agricoles.
Qu’est-ce qui est étudié, au niveau agronomique et énergétique ?
En Wallonie, le seigle semble progressivement gagner de la place dans les couverts en région de Grandes Cultures. En vue d’améliorer les connaissances et le conseil variétal aux agriculteurs souhaitant diversifier leurs productions, des essais variétaux en seigle d’hiver précoces sont menés, tant en variété pure qu’en mélange avec de la vesce velue. Au total, 6 modalités seront testées : trois variétés semées en pur, puis en mélange avec la vesce velue. Ce mélange avec une légumineuse permet d’en étudier l’intérêt agronomique et énergétique.
Concernant la production d’énergie, des prélèvements de biomasse seront effectués dans le courant du mois d’avril pour évaluer la teneur en matière sèche et le potentiel de production en biométhane (ou analyses BMP, pour Bio-Methan Potential). Une fois récolté, ce couvert sera suivi par l’implantation d’une culture de printemps, comme le maïs ou le sorgho.
Il y a-t-il un impact sur la culture suivante ?
Conduire une CIVE demande de repenser les séquences de culture. L’objectif derrière ce type de couvert étant de maximiser la biomasse pour la production énergétique durable, la façon dont le couvert est géré aura plus ou moins d’impact sur la culture qui lui succède. L’objectif pour l'unité de biométhanisation et l’agriculteur est de trouver le meilleur compromis entre rendement en matière sèche du couvert et impact minimum sur la culture suivante.
Dans cette optique, une dernière modalité sera évaluée : la date de récolte. La première récolte se fera au plus proche de la date de semis traditionnelle de la culture suivante (maïs fourrager), tandis que la seconde récolte sera plus tardive (+/- 18 jours) et impliquera donc une implantation plus tardive de la culture suivante (maïs fourrager ou sorgho si les conditions s’y prêtent). Des prélèvements complémentaires de biomasse seront effectués pour évaluer l’impact de cette dernière modalité sur les rendements de la CIVE et de la culture suivante.
Quelle est la situation actuelle ?
Tous les semis ont été réalisés avec succès, en collaboration avec Biométhane du Bois d’Arnelle et Biogaz du Haut Geer. Le premier essai a été implanté du côté de Frasnes-lez-Anvaing le 18 septembre et le second à Hannut le 07 octobre 2024. Les CIVEs vont se développer progressivement, couvrir le sol lors de la saison hivernale et reprendre leur croissance à l’arrivée du printemps.
Un potentiel pour la transition énergétique
Les CIVEs représentent une solution prometteuse pour soutenir la filière de la biométhanisation en Wallonie. Ces intercultures permettent non seulement de produire de la biomasse pour le biogaz, mais contribuent également à la protection des sols, tout en augmentant la durabilité des pratiques agricoles. Les essais menés par Valbiom et Greenotec, en collaboration avec des acteurs locaux, permettront d’affiner les connaissances sur leurs performances agronomiques et énergétiques, ouvrant potentiellement la voie à un développement plus large de cette diversification dans les années à venir.