L’exploitation agricole de la famille Jennes, située à Xhendelesse, dans l’Est de la Belgique, est l’une des dernières à exploiter un riche patrimoine d’arbres têtards et tire le meilleur parti d'un paysage unique.
Découverte de "La ferme aux 100 têtards".
Ferme laitière diversifiée d’une quarantaine d’hectares, l’exploitation de la famille Jennes est riche en maillage écologique de haies et d’arbres têtards de différentes espèces : saule, frêne, charme, érable et aulne. L’entretien de ce patrimoine chauffe trois logements par l’intermédiaire d’un réseau de chaleur.
Un mode ancestral de conduite de l'arbre
Le « trognage » de l’arbre feuillu vise à stimuler la production de bois et faciliter sa récolte. Le bois exploité avait historiquement pour vocation la production de bois bûches, piquets de clôtures ou manches de bois. L’arbre têtard, aussi appelé « trogne », pouvait avoir une vocation fourragère, comme c’est particulièrement le cas du frêne, qui supporte un élagage estival au moment où la sécheresse peut affecter l’herbage.
Dans son jeune âge, l’arbre est étêté à une hauteur qui protègera les rameaux de la dent du bétail. Ce mode de conduite particulièrement répandu entre le Moyen-Âge et la moitié du XXème siècle est aujourd’hui largement tombé en désuétude du fait de la mécanisation du travail du bois et, localement, des remembrements successifs. Ses nombreuses plus-values incitent pourtant de plus en plus de personnes à reconsidérer ce mode d’exploitation.
L’arbre têtard, un patrimoine unique pour la biodiversité
Ce mode d'exploitation conduit progressivement le cœur des arbres à se dégrader du fait, dans un premier temps, de l’activité fongique, sans que la vigueur de l’arbre n’en soit fondamentalement affectée. Il en résulte des cavités précieuses pour un riche cortège d’espèces. Les oiseaux nichant dans les cavités, comme les chouettes, mais aussi des insectes saproxylophages, qui tirent parti du bois en décomposition. Sur les vieux individus, il n’est pas rare qu’une végétation se développe au cœur des arbres par la présence d’un humus enrichi par l’activité biologique.
Les têtards chauffent trois logements
Il y a une quinzaine d’années, la famille Jennes a installé une chaudière à plaquettes bois-énergie pour tirer le meilleur parti de son patrimoine arboricole. Aujourd’hui, une partie seulement de l’accroissement annuel de l’exploitation substitue 8.000 litres de mazout. Pour ce faire, Nicolas Jennes élague lui-même ses haies et têtards. Les plus grosses sections sont déplacées et centralisées à l’aide d’un engin téléscopique et un prestataire s’occupe du déchiquetage de la matière. Le bois est ensuite stocké en silo bâché ou sous abri, suivant la place disponible, avant un acheminement progressif au silo. Des calorimètres situés dans la chaufferie permettent de répartir les charges de chauffage entre les différents logements.
L'occasion de se rappeler que chaque ferme possède un potentiel d’autonomie énergétique en chauffage potentiellement important. Au point d’imaginer que la création de petits réseaux de de vente de chaleur puisse devenir une activité de diversification de l’exploitation.
Deux impératifs : travail manuel et sécurité
L’entretien des arbres têtards nécessite des soins précis, réguliers, et manuels (tronçonneuse). Sa fréquence est fonction de l’essence et de sa vigueur. L’entretien n’est pas exempt de danger, notamment du fait du caractère creux et fragile de ces arbres. La taille peut libérer certaines tensions dans le bois et produire des éclatements. Le novice ne devra pas hésiter à demander conseil à un élagueur professionnel ou recourir à ses services pour tirer parti de ces arbres en toute sécurité.
Avec le soutien de la Wallonie
Cette visite est permise grâce à notre convention cadre "BioMaSER" qui vise à développer et structurer les filières de valorisation non alimentaire de biomasses agricoles en tant que matériaux ou combustibles renouvelables. Convention financée par la Wallonie, SPW Agriculture, sous la supervision du Ministre de l’Agriculture.